« J’ai toujours eu du mal à globaliser mes activités. Mais disons que ma première profession est l’infographie. En 2010 j’ai crée un blog socioculturel qui s‘appelait Tagraphe. Ça me permettait alors de découvrir le style et les artistes de la scène urbaine du Sénégal. J’ai également depuis l’enfance une passion pour le dessin et l’art du portrait. Aussi je m’intéresse depuis quelques temps à l’artisanat. Je suis donc devenue une artiste multidisciplinaire, qui évolue dans l’art graphique et numérique. Je suis aussi devenu Maître artisan d’art. J’ai finis par monter mon entreprise créative individuelle en 2011, Graffiks To’. J’ai également une marque artisanale de streetwear qui s’appelle GTo’. J’y applique l’art du portrait, mais cette fois-ci manuellement sur un support textile et de manière artisanale. »
Les débuts
« J’ai grandi dans une famille qui donnait de l’importance à la culture et l’art dans sa globalité. A la fin des années 1980, mon père avait été nommé Directeur de la Culture à l’ACCT (actuelle Agence de la Francophonie). Il nous a initié tous jeunes. Durant mes études, j’étais à l’Université de Dakar, au département d’Anglais, parce qu’à ce moment là, je voulais devenir journaliste à la radio et interprète en langue.
Après l’université, j’ai eu des soucis de santé qui m’ont fait prendre du retard. Durant ma convalescence, ma famille m’a encouragé à poursuivre une pratique artistique, ma passion depuis l’enfance. J’ai donc fait un BTS en infographie et par la suite j’ai pris des cours en arts visuels à Taggat, d’où jesuis sortie major de ma promotion, tout comme la précédente. Kalidou Kassé avait à l’époque initié ce projet d’école. On a eu la chance d’avoir de bons professeurs et des cours variés.
Son travail
« L’esthétisme est important pour moi mais j’essaye surtout de véhiculer un message. J’essaye de créer des choses qui poussent à la réflexion. Qu’on apprécie l’esthétique ou pas, je trouve intéressant de pousser le spectateur à un questionnement. Je pense que l’art sert à ça, à questionner et pousser le spectateur à avoir sa propre réflexion sur les œuvres en face de lui. J’écoute aussi beaucoup les critiques constructives parce qu’il faut aussi apprendre à remettre son travail en question…
Ma première exposition date de 2012, durant la biennale. J’avais invité des artistes et nous devions exposer à la Chambre de commerce de Dakar mais il y’a eu des imprévus ; par-conséquent, avec l’aide d’Haby Diallo, que je rencontrais à ce moment là, j’ai pu finalement exposer chez elle à la Médina. Les expositions sont le meilleur moyen d’avoir le ressenti du public. Le fait de travailler en collaboration c’est aussi le bon moyen d’avoir un avis critique sur son travail mais aussi de découvrir autre chose, une autre vision, d’autres médiums etc. C’est aussi une belle façon de se motiver et de se soutenir.
A côté de çà, j’ai eu aussi à faire des expositions, seule ou en commun, notamment au niveau de la Fiara, deux autres biennales, etc.
Au cours des dernières années, j’ai animé des ateliers avec des enfants ou des adultes dans le cadre de Festivals ou dans des espaces culturels ou encore avec des écoles. J’ai arrêté d’en organiser, car j’attends d’avoir le bon espace. Je travail pour le moment à domicile et l’espace n’est pas adapté pour recevoir des classes de plusieurs personnes. Je travail sur une technique particulière et avec des matériaux qui ont un coût, donc l’aspect logistique peut parfois être un frein. Il faut pouvoir financer ses activités artistiques mais fort heureusement, ma famille me soutient énormément.
J’aimerais avoir une boutique et dans celle-ci pouvoir accueillir des ateliers. »
L’entreprenariat
« Je dirais entrepreneur social. J’ai une petite société mais je n’ai pas encore d’employés. J’attends d’avoir un espace plus adéquat, pour pouvoir engager du personnel et surtout transmettre. On ne sait jamais, s’il m’arrivait quelque chose, j’aimerais que mon savoir faire soit transmis et puisse perdurer. Ensuite on pourra vendre, distribuer, exporter etc. Pour l’instant je vends en ligne… La personne commande en ligne et paye à la livraison. Mais je dois dire que les gens ne sont pas encore totalement à l’aise, même si ce n’est pas un modèle nouveau… »
L’avenir
« Aujourd’hui, j’avoue qu’il y’a différentes problématiques qui freinent le développement de la scène culturelle. D’abord la question de la visibilité. C’est vrai qu’avec les réseaux sociaux les choses sont facilitées mais le problème persiste. Je trouve aussi que le milieu artistique underground qui était à une époque très dynamique est un peu en baisse de régime. Le faite qu’il n’y ait pas de politique étatique qui œuvre et qui propose un accompagnement aux artistes. Je pense que se serait bien qu’il y’est aussi plus d’espaces, de structures ou de pôles urbains pour provoquer un engouement chez les jeunes. Actuellement c’est un peu morose mais je reste optimiste… »
Femme + Artiste + Sénégal
« Etre une artiste regroupe beaucoup de choses. Des difficultés il y’en a dans tous les métiers. Des imprévus, des surprises il y’en aura toujours. La femme sénégalaise est très brave, il ne faut pas se limiter ! Quand je fais de la pyrogravure on peut regarde un peu bizarrement et les gens s’inquiètent parce que je suis une femme qui manipule du feu… Si c’était un homme est ce qu’on ferait cette réflexion ? Les femmes peuvent faire tous les métiers. Quand on est artiste, on ne peut pas se limiter et mon genre ne m’empêchera pas non plus de faire ce que j’ai envie… Il y’a des femmes dans tous les milieux de la culture. Il faut encourager les femmes à s’élancer. »
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