“Selebe Yoon a le plaisir de présenter “Les Tambours de La Mer”, une exposition sculpturale d’œuvres récentes d’El Hadji Sy (né en 1954), en hommage à Doudou N’diaye Rose, percussionniste sénégalais de renommée internationale. Des dizaines de sculptures verticales composées d’éléments du monde marin sont érigées dans l’espace d’exposition comme un orchestre silencieux.

El Hadji Sy, depuis la création du Laboratoire Agit’ Art en 1974, a toujours cherché à articuler les arts – théâtre, danse, musique, arts visuels, littérature et design – et à traduire ces différents médiums en une “syntaxe visuelle”. En tant qu’objets scéniques, ses œuvres célèbrent le grand maître des tambours, capable de diriger une centaine de batteurs sur plusieurs rythmes à la fois. Emblème du tambour sabar, Doudou N’diaye Rose a innové la percussion en alternant de nouvelles créations rythmiques avec des sons traditionnels. Face à ses sculptures, on imagine la frénésie des mains et des pieds des percussionnistes mais aussi ceux d’El Hadji Sy, connu pour peindre en dansant, en tapant et en frappant la toile dans les années 1970, les pieds couverts de peinture pour marquer sa protestation contre les dogmes esthétiques de la négritude. 

Alors que certaines sculptures sont recouvertes de coquillages, de galets, de lignes de pêche, de hublots, de lanternes de mer, de voiles, la partie supérieure, d’apparence monolithique, est peinte, enveloppée de papier mâché ou de plusieurs couches de tissu blanc. Ce geste de momification rappelle sa performance SOS Culture où il a été lui-même enveloppé par le défunt Issa Samb à la Whitechapel Gallery en 1995. 

Ces sculptures évoquent simultanément d’autres objets fonctionnels et hautement symboliques, comme le note l’artiste : 

“Le mortier est devenu un tambour, le pilon est devenu un bâton,Sons mégalithiques, 

L’ensemble devient une sculpture. (Entretien avec l’artiste, avril 2023) 

En évoquant la première musique du monde, la mer, El Hadji Sy convoque les sous-bassement du monde marin qui encerclent la presqu’île et ce ventre maternel qui aujourd’hui souffre du réchauffement climatique. Ce n’est pas la première fois que l’artiste parle de l’Atlantique: en 2015, à la Biennale de Sao Paulo, il propose une installation intitulée « Archéologie Marine » en hommage à ceux qui ont péri en mer lors de la traite négrière.   

Au sein de l’exposition, le visiteur parcourt également “Les armoires de la mémoire”, des œuvres à mi-chemin entre le design et l’art qui révèlent pour la première fois l’artiste-designer. L’armoire, espace fonctionnel qui taquine aussi l’imaginaire, est un lieu d’intimité, de mémoire, avec une ouverture possible sur le monde.

Droit d’auteur du texte : Selebe Yoon“